Joe Biden a déclaré qu’il voulait « to heal » l’Amérique. Le healer est le guérisseur, avec toutes les connotations spiritualistes de la notion. Une figure très tendance dans la société occidentale qui désire actuellement hybrider sa médecine rationnelle avec des médecines plus émotionnelles : chinoise, ayurvédique, psychosomatique.
Mais « to heal » dit étymologiquement autre chose. Le mot indique avant tout que pour aller mieux, il faut que le corps retrouve son entièreté. Dans l’éco-système sémantique se trouve whole : entier. En français, plutôt que « Guérison », ce qui est ainsi suggéré, c’est « Convalescence » : le fait que tous les organes soit valeureux ensemble (cum valere). Ce que dit aussi Health.
Avec cette idée d’unité – notion sur laquelle le 46èmeprésident des Etats-Unis a insisté dans son discours de victoire – on pense au geste d’Isis redonnant vie à Osiris en recousant entre eux les morceaux éparpillés de son corps. Ce geste incarne la fonction remembrante du Roi-Tisserand dont ont parlé les premiers penseurs de la cité-grecque : un gouvernant qui sait faire ou refaire le tissu social.
Soigner l’Amérique actuelle sera non seulement tenter de la guérir du Covid-19, mais également tout faire pour relier les parties fragmentées de son body : l’un, ce week-end, a dansé tandis que l’autre brandissait des armes.
De ce point de vue, la figure archétypale du Healer trouve des incarnations tout autour de la planète, dessinant pour l’avenir une opposition visible à l’œil nu, physique, entre les leaders qui délient et ceux qui relient.
Mariette Darrigrand